Mar 29 Sep - 19:17
- « Hahaha, t’as pris cher cette fois-ci on d… »
L’aura pas fini sa phrase, ce ptit con. L’aura pas fini sa phrase parce qu’un tour d’main, j’venais d’encastrer son crane dans l’mur derrière lui. Ça avait clairement pas trainé et l’initiative eut l’don d’faire reculer les quelques gars qui faisaient d’habitude le guet devant l’une des entrées principales menant au marché. S’ils avaient doucement rigolé devant ma démarche claudicante et ma grosse tête emmitouflée par un gros bandage, ces bâtards étaient maintenant calmes. Même dérouillé comme jamais auparavant, j’avais toujours autant d’poigne et d’force pour cogner les enfoirés qui osaient l’ouvrir. J’restais quand même une grosse bête et lorsqu’une bête blessée se sentait acculée (offensée pour mon cas), bah, ça chargeait, ça cognait sec et ça faisait clairement pas dans la demi-mesure ! D’toute façon, j’étais incapable d’me tempérer dans mes élans dans la plupart des cas. C’était bien pour ça que j’passais plus mon temps à cogner des bêtes à l’extérieur qu’à m’languir d’la belle vie à l’intérieur de la ville. ‘Fin, après, baiser des putains, c’était pas mal non plus question défoulement. Faut dire ce qui est hein. Nature. Toujours nature.
- « Y’en a un parmi vous qui a vu el proffessor passer ici ? »
- « Celui avec les tatouages cheloues là ? Non, il est pas passé par ici… »
Dès qu’ils me répondirent, j’repris ma marche laborieuse à l’intérieur même du marché. On pouvait voir que j’douillais à chaque fois que j’boitais, mais j’pouvais pas en vouloir à quiconque : déjà parce que c’était mon taf d’me confronter aux grosses bestioles et ensuite parce que personne m’avait jamais forcé la main pour faire un tel job. La commande spéciale du nain avait effrayé pas mal d’collègues qui venaient également en sous-marin dans ce marché vendre leurs trouvailles. Aucun avait accepté l’marché. Aucun sauf bibi. Oui parce que j’portais bien mes couilles et aussi parce que l’air plutôt insolent (malicieux ?) du timbré d’prof avait titillé mon égo. A bien y repenser, c’était comme s’il avait essayé d’nous envoyer à l’abattoir. Ça en avait presque tout l’air, ouais. Mais j’étais certain que derrière, il était pas aussi con et sadique pour avoir ce genre de but qui l’desservirait : après tout, sans chasseurs d’primes chevronnés et suicidaires comme moi, pas mal d’alchimistes s’feraient chier et/ou fermeraient boutique. A bien des égards, on était quand même des héros. Enfin… Vite fait quoi. Vu comment les gars d’ma branche (la traque) étaient traités d’fous…
- « Eh ben… Ça a pas été facile, cette fois-ci on dirait, hahaha ! »
- « Oh, ferme là sale vioque ! T’vas pas m’faire chier toi aussi ! »
J’avais fini par rentrer dans un local délabré creusé à même la roche, mais dont certains piliers et recoins avaient été soutenu et retouché par du bois. Bois devenu miteux avec l’temps. C’était à s’demander comment ça tenait, putain ! L’gars qui m’avait adressé la parole alors que j’étais à peine entré dans son coin était Joe. C’était un vieux barman qui avait jadis était un chasseur lui-aussi. Une sombre affaire lui avait cependant failli couter la prison, ce pourquoi il s’refugia dans les profondeurs d’ouroboros et monta pépère son bar dans l’marché. L’endroit était généralement bondé tard l’soir. C’était un coin tranquille où l’on pouvait s’relaxer un peu, mais aussi parler affaires pour ceux qui n’avaient pas d’étals ou d’magasins à proprement parler, ce qui était mon cas. J’étais après tout un revendeur occasionnel et j’me voyais pas faire du business h24 au risque non seulement d’me faire chier avec ça mais aussi d’me faire cramer comme un con. Manquerait plus que j’perde mes passe-droits et autres de chasseur. La déprime que ce serait… Une pensée lugubre que j’chassai d’mon esprit avant d’poser mon caisson au pied de l’une des tables inoccupées.
- « Comme d’habitude, p'tit con ? »
- « Ouais, comme d’habitude l’vioque. D'la vinasse pour oublier ses soucis, y'a que ça d'vrai ! » Que j’répondis avant d’poser mon cul sur un siège.
Plus qu’à attendre que l’gnome s’pointe. C’était notre point d’rendez-vous après tout.